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Page:Tarde - L’Opposition universelle, Alcan, 1897.djvu/388

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repousse a priori. Après avoir cru prouver que la concurrence est indestructible, il ajoute : « Oserez-vous dire qu’un phénomène indestructible, et par conséquent providentiel, peut être malfaisant ? »

Dans ses développements à ce sujet, il dit un mot en passant, tout fait incidemment, des inventions qui, dit-il, une fois imitées, tombent dans le domaine commun « grâce à la concurrence » des industriels qui les exploitent. Si ce grand esprit, — digne, je me hâte de le dire, de beaucoup plus de respect qu’on ne lui en témoigne de nos jours - eût arrêté son attention pénétrante sur ce point, il n’aurait pas manqué de s’apercevoir qu’il confond ici, manifestement, deux choses bien distinctes : les bons effets incontestables de la propagation imitative des inventions et les conséquences, beaucoup moins louables, beaucoup plus discutables, de leur concurrence, qui s’établit entre les co-producteurs d’un même article. Ce n’est pas parce que ceux-ci cherchent à s’enlever réciproquement leur clientèle et à se faire tout le mal commercial possible, que le bénéfice d’une invention relative à la fabrication de cet article, d’individuel, devient social. C’est au contraire, parce qu’ils ont commencé par avoir connaissance de cette invention, c’est parce qu’elle s’est propagée peu à peu, en copies successives, de l’inventeur à eux, qu’ils ont songé à faire concurrence à celui qui, auparavant, l’exploitait seule. Tant que ce dernier en a eu le secret, la concurrence avec lui a été impossible ou désastreuse. Il faut

    est qu’ils se sont surtout très mal compris eux-mêmes, très mal entendus avec eux-mêmes. Quant aux darwinistes sociaux c’est une morale du despotisme pur de toute pitié qu’il conviendrait d’esquisser à leur usage.