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Page:Taxil, Hacks, Le Diable au XIXe siècle, Delhomme et Briguet, 1894, tome 2, partie 1.djvu/102

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plaudissement. Il ne nous avait point entendu ouvrir la porte de sa chambre. À notre question : « Que signifie ce que vous faites-là ? — Je suis, nous répondit-il, comme le fou dont parle Horace, j’assiste à un spectacle imaginaire. Je m’ennuyais au coin de mon feu ; j’aime beaucoup les merveilles de l’Opéra, je me suis représenté à moi-même le ballet de la Sylphide, et quand vous êtes venu me frapper sur l’épaule, j’applaudissais la Taglioni. »

Parmi les analogies que l’observation psychologique peut nous offrir pour nous aider à nous rendre compte du caractère de l’hallucination naturelle, la plus frappante, la plus instructive se trouve dans les phénomènes du rêve. L’hallucination n’est, en somme, que le rêve d’un homme éveillé, et tout doit s’y passer psychologiquement et physiologiquement comme dans le rêve ; quand la science nous aura révélé le mystère du rêve, elle aura par là même pénétré le mystère de l’hallucination.

Il y a toutefois entre les hallucinations du sommeil et celles de la veille, quand elles ne sont pas liées à une disposition morbide, cette différence essentielle que, dans la veille, l’individu a la faculté de contrôler ses pensées, d’en changer le cours par un acte de sa volonté, d’en appeler aux témoignages de ceux qui l’entourent, afin de voir si leurs sensations concordent ou non avec les siennes, et par là de corriger son illusion et d’y mettre un terme. Mais il n’y a, dans ce cas, il faut le reconnaitre, qu’une hallucination imparfaite ou incomplète ; dans les cas plus ordinaires, où l’hallucination revêt un caractère morbide, et où l’halluciné croit irrésistiblement à la réalité extérieure de ses visions, le raisonnement est en défaut, et les impressions fausses ne peuvent se corriger ; l’hallucination ne disparaît qu’avec la maladie qui l’a causée, ou dont elle est un des symptômes.

Il y a, en effet, comme l’ont observé tous les médecins ou psychologues qui se sont occupés de cette question, des hallucinations compatibles avec la raison, se manifestant chez des individus jouissant de l’intégrité de leurs facultés intellectuelles, — ces hallucinations sont purement physiologiques, — et des hallucinations pathologiques, survenant à l’occasion d’un trouble plus ou moins profond dans l’équilibre des fonctions, phénomènes maladifs ayant leur siège dans le cerveau et constituant une sorte de folie, d’aliénation mentale. C’est là la véritable hallucination, à laquelle on peut assigner ses causes naturelles, et aussi ses remèdes, une fois que ces causes sont scientifiquement déterminées : elle est dons essentiellement du ressort de la m[illisible]

De ce qui précède, on peut conclure qu’il n’y a, entre la perception normale excitée par des objets extérieurs et cette perception anormale qu’on appelle l’hallucination, d’autre différence que l’existence dans le premier cas d’un objet extérieur correspondant à la sensation, et l’absence dans le second de