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Page:Taxil, Hacks, Le Diable au XIXe siècle, Delhomme et Briguet, 1894, tome 2, partie 1.djvu/237

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qu’accidentels. Hors de là, la jettatura est une superstition des plus absurdes. Il importait néanmoins de la mentionner, puisqu’elle est très répandue et que l’on voit souvent des bonnes gens tendre le doigt du milieu en avant, les autres doigts de la main fermés, s’imaginant que ce signe préserve de la mauvaise influence des personnes ayant le mauvais œil.


Fascination par les Miroirs Magiques. — Fasciner le regard de l’homme, c’est-à-dire créer en lui, par l’enchantement de la vue, des hallucinations merveilleuses, tel a été toujours un des principaux objets de la magie.

À cette fascination se rapportent tous les prétendus prodiges opérés par les magiciens, prodiges qui, lorsqu’ils ne sont pas dus à la supercherie ou à la prestidigitation, ne peuvent évidemment être attribués qu’à la puissance démoniaque, aussi inépuisable dans ses tours de passe-passe que dans ses phénomènes réels. J’en ai rapporté un assez grand nombre d’exemples pour me borner ici à un prestige qui se rattache directement à la fascination de la vue proprement dite : les miroirs magiques, une des fantasmagories les plus familières à l’art satanique.

L’usage du miroir magique remonte aux époques fabuleuses de la Grèce : c’est en regardant dans un miroir ou bouclier d’airain, reçu des mains d’Athéné (Minerve), que Persée coupa la tête des Gorgones, dont le regard fascinateur changeait en pierres ceux qui les regardaient. Les sorcières ou sagas de la Thessalie traçaient sur des miroirs magiques leurs formules avec du sang : la lune les réfléchissait, et la réponse s’imprimait d’elle-même sur son croissant.

Pendant tout le moyen-âge, les miroirs magiques ont joué un rôle important dans les opérations occultes. Le miroir magique inventé par Roger Bacon eut, du treizième siècle au seizième, une grande célébrité ; on le voit apparaitre sur la scène anglaise au temps même d’Élisabeth dans les pièces qui mettent en action les hauts faits de la magie anglaise. C’était un moyen de divination vulgairement employé ; et, circonstance singulière, la personne qui était appelée à y voir les apparitions révélatrices était une jeune fille de vie pure ; cette tradition s’est conservée, comme nous l’avons vu, dans les pupilles ou colombes de Cagliostro. Les esprits surnaturels qui y paraissaient répondaient aux questionneurs « d’une voix venant fortement de la gorge et ayant l’accent irlandais très prononcé. » Ces miroirs étaient ordinairement fabriqués avec les sept métaux hermétiques, et constellés de signes diaboliques ou de pantacles.

Un grand magicien anglais du seizième siècle, grand favori de la reine Élisabeth, le docteur Dée, s’entretenait familièrement avec les esprits à l’aide d’un cristal noir de forme convexe que lui avait donné le daimon Uriel ; il lui