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Page:Taxil, Hacks, Le Diable au XIXe siècle, Delhomme et Briguet, 1894, tome 2, partie 1.djvu/327

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(telem ; teraphim, en hébreu) s’appliqua dans l’origine à des objets, pierres, métaux ou bandelettes, sur lesquels était imprimée ou ciselée la figure ou l’image d’un signe céleste ; le talisman se rattache par là à l’astrologie.

La foi aveugle dans les talismans, c’est-à-dire en certains objets enchantés ou ayant la vertu de porter bonheur ou d’écarter les maladies ou autres maux humains, est aussi ancienne que le monde. Enfantée dans l’Orient par le fatalisme, elle s’est surtout conservée chez les peuples dont le fatalisme est resté le dogme religieux fondamental, chez les Mahométans, par exemple. Les anciens Persans, pour se préserver de différents maux, appliquaient sur diverses parties du corps des tahvids, espèces de bandelettes, ornées de sentences mystérieuses. Les thothaphoth ou philactères des Hébreux étaient des amulettes du même genre. Les abraxas, introduits par les Gnostiques en Occident, n’étaient aussi que des amulettes empruntées à la Syrie et à l’Égypte. Aujourd’hui encore, les bouddhistes de Ceylan s’appliquent sur leurs membres des images des démons qui doivent les guérir infailliblement. De nos jours, certaines peuplades américaines, les nègres et les insulaires de la mer du Sud, ont leurs amulettes, consistant le plus ordinairement en pierres taillées et polies, en un morceau d’or ou un fruit sec, représentant grossièrement une figure d’homme ou de divinité, ou une image obscène. Le grand Lama envoie des sachets de ses excréments réduits en poudre aux potentats de l’Asie, qui les portent avec un respect religieux en amulettes. Beaucoup des substances que nous avons vu figurer dans la composition des charmes deviennent des talismans ou des amulettes : la poudre de crapaud, la râpure de crâne humain, l’ongle de l’élan, des têtes de milan, des poils de la queue d’un loup, les scarabées, l’hippomane, etc…

De nombreux personnages de l’antiquité grecque et latine, et même des naturalistes, tels que Pline, croyaient à l’influence des talismans. D’après Plutarque, Périclès portait un talisman à son cou et en mettait à celui de ses enfants. La plupart des bijoux antiques n’étaient que des talismans ou des amulettes, portés dans une pensée superstitieuse. Chez les magiciens, les talismans jouaient un grand rôle dans leurs opérations. Apollonius de Tyane, en parcourant la Grèce, laissait des talismans partout où il passait. Il délivra les habitants d’Antioche des moucherons qui les infestaient, en faisant porter dans une procession des images en plomb représentant le dieu Mars. C’est encore avec des talismans qu’il délivra Constantinople des scorpions (en gravant sur le cuivre le signe céleste de ces reptiles) et qu’il arrêta les inondations du fleuve Lycus. Paracelse avait ses « boîtes aux influences. » On connaît la célébrité des talismans cabalistiques de Catherine de Médicis.

Renouvelés par les Gnostiques et les hérésiarques des premiers siècles de l’ère chrétienne, les talismans tombèrent sous les censures et les anathèmes de l’Église, condamnant, comme pratique diabolique, l’usage de substances