Aller au contenu

Page:Taxil, Hacks, Le Diable au XIXe siècle, Delhomme et Briguet, 1894, tome 2, partie 1.djvu/464

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

est à peu près nulle. On ne saurait en dire autant de Martinez. À celui-ci seul se rattachent les loges fondées par le Martinisme ou qui en adoptèrent les doctrines. Outre un certain nombre de loges françaises, à Lyon, à Bordeaux, à Paris, qui professaient le Martinisme, il faut compter, comme inspirée par ses doctrines, une vaste affiliation maçonnique appelée l’École du Nord, ayant son centre à Copenhague. Le fameux Lavater était un disciple de cette Ecole du Nord. En Russie, le martinisme s’était assez répandu pour donner ombrage à Catherine II, qui composa contre les Martinistes deux comédies satiriques : « Ces comédies, dit Saint-Martin, ne firent qu’accroître la secte. » On retrouve des traces évidentes du Martinisme dans les constitutions du rite de Misraïm, fondé par des juifs s’inspirant de Cagliostro. L’Illuminisme se répandit aussi en Italie ; ses règlements furent saisis par le sénat de Venise et dénoncés officiellement à la France.

Quelque temps avant le convent de Wilhelmsbad, l’Illuminisme français avait tenu à Lyon une grande assemblée sous le nom de Convent des Gaules, sous la direction prépondérante de la Loge Centrale de Lyon dite des Chevaliers Bienfaisants, laquelle était en haute estime auprès des loges templières d’Allemagne, et considérée comme la loge-mère de l’association. On y avait devancé sur plusieurs points les décisions du convent de Wilhelmsbad, en particulier sur celui de choisir le duc Ferdinand de Brunswick pour chef suprême de toute la maçonnerie. Les loges appartenant au Martinisme français députèrent à Wilhelmsbad, avec Saint-Martin le président de ce convent des Gaules, le frère de Villermoz, négociant lyonnais, Le Chape de la Heuzière, faisant partie du comité secret des Amis Réunis de Paris, et le comte de Virieu, un honnête maçon, qui, effrayé de ce qu’il y avait vu et entendu, finit par abandonner la secte : « Je ne vous dirai pas, répondait-il au comte de Gillière, qui le pressait à son retour sur ce qui s’était passé dans l’assemblée, je ne vous dirai pas les secrets que j’apporte ; mais ce que je crois pouvoir vous dire, c’est qu’il se trouve une conspiration si bien ourdie et si profonde, qu’il sera bien difficile à la religion et aux gouvernements de ne pas succomber. »

Il n’est donc pas étonnant de voir les loges martinistes jouer un rôle important dans le convent de Wilhemsbad ; leurs députés, forts de la protection de Ferdinand de Brunswick, n’épargnèrent rien pour y faire triompher leurs idées et leurs desseins.

Il n’entre pas dans mon plan de retracer l’histoire, de cette mémorable assemblée, d’où la maçonnerie sortit, comme les Grecs du cheval de bois, tout armée pour la destruction de la religion et de l’ordre social. Tout ce que j’ai à en dire sans sortir de mon sujet, c’est que le Martinisme ou Illuminisme français, inspiré par le juif Martinez Pasqualis, y donna la main à l’Illuminisme allemand fondé par Weishaupt, le véritable ordonnateur secret du