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Page:Taxil, Hacks, Le Diable au XIXe siècle, Delhomme et Briguet, 1894, tome 2, partie 1.djvu/61

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propositions ; bien plus, je serais heureuse de le chasser honteusement, en lui opposant tout à coup une médaille ou un scapulaire. Mais j’aimerais bien le voir tout de même, en tête-à-tête, et je n’ai pas peur de lui, allez !

Comme nous retrouvons là la curiosité d’Ève ! Combien de ses filles ne sont pas corrigées !… On s’imagine que les formules des rituels de magie sont absolument indispensables. Quelle grande erreur ! Satan a inspiré et quelquefois dicté lui-même ces formules ; mais il vient, quand Dieu le lui permet, sans avoir besoin nullement d’être appelé, sollicité, évoqué. Or, ce seul désir d’avoir une entrevue avec lui est déjà des plus coupables. S’il apparaissait, dans de telles circonstances, ce ne serait pas sous une forme hideuse ni entouré d’un appareil effrayant. Loin de là, il se ferait aimable, intéressant, pour mieux séduire ; il a toutes les ruses, même celle de feindre le repentir de sa révolte, quand il veut tenter une âme pieuse. Il demanda, un jour, à un ermite (j’ai vu cela dans un livre d’hagiographie) de prier pour lui, d’implorer de Dieu la miséricorde et de le faire rentrer en grâce parmi les anges du ciel ; l’hypocrite ! il n’avait d’autre but que d’accoutumer le saint homme à ses visites ; mais il en fut pour ses frais. L’ermite, sachant bien qu’on ne doit avoir aucun commerce, si anodin qu’il puisse sembler, avec l’éternel maudit, le chassa dès sa première tentative par un énergique : Vade retro, Satanas ! On peut donc s’attendre à ce qu’il déploie toute l’habileté nécessaire pour ne pas effaroucher la curieuse qui désire le voir, et c’est vraiment un jeu bien dangereux que de concevoir de pareils désirs. Ainsi, rejetez bien loin ce sentiment, madame ou mademoiselle, s’il s’éveille en vous ; étouffez cette curiosité coupable, dès que vous la sentez naître ; car Satan, pour peu que vous en exprimiez la demande avec ou sans formule, viendrait, et s’il ne vous est pas encore apparu, madame ou mademoiselle, c’est que vous avez au ciel quelque puissant protecteur qui intercède en votre faveur, qui obtient de Dieu que la bride ne soit pas lâchée à Satan en ce qui vous concerne, c’est que votre saint patron, en un mot, ou la sainte Vierge, vous défend contre votre folie, contre vous.

J’en reviens à l’anthropomancie et aux criminelles pratiques du même genre. Quand on étudie l’histoire, on constate que Florence a été un foyer de magisme ; beaucoup de grands sorciers du moyen-âge et de l’époque de la Renaissance, venus dans notre pays, étaient florentins.

Je ne puis passer ici sous silence le cas de Catherine de Médicis : tout en dégageant cette reine des légendes outrées, forgées par les protestants, il n’en reste pas moins acquis qu’elle était superstitieuse, et que, Dieu ne l’exauçant pas à son gré, elle ne craignait pas de recourir au diable.

Triste souveraine que celle-là, qui, avant d’être couronnée à Saint-Denis, avait commencé par s’effacer par calcul devant Diane de Poitiers, dont le triomphe était une insulte permanente à ses droits d’épouse ; qui, une fois