Page:Taxil, Hacks, Le Diable au XIXe siècle, Delhomme et Briguet, 1894.djvu/244

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Bouddis. Le clergé séculier se compose de Tchoïdsches (scribes) et de Rabdschampas (docteurs). Il existe aussi, dans le lamaïsme, des couvents de nonnes, gouvernés par des abbesses ; et des esprits, dit-on, sont incarnés en ces supérieures. Les couvents sont fort riches et servent de séjour aux plus abominables luxures.

Tous les ecclésiastiques du bouddhisme lamaïque sont évocateurs, astrologues, magnétiseurs, médecins et magiciens, à divers degrés.

C’est donc sur les hauts plateaux de cette partie de l’empire chinois qui est appelée le Thibet, que se trouvent les lamaseries de Liasse, la ville-sainte, et, à peu de distance, la lamaserie souveraine ou palais du Dalaï-Lama.

Lorsque le personnage qui exerce la fonction pontificale suprême vient à mourir, les lamas se mettent alors en recherches : il s’agit de découvrir, parmi les serpents de la contrée, celui en qui s’est incarné l’esprit de Bouddha au moment du dernier soupir du titulaire défunt.

Au moyen de certaines pratiques, — entre autres, une baguette de coudrier qui tourne entre les mains de celui qui la porte, dès qu’il se trouve en présence du serpent, objet de la divine réincarnation, — celui-ci est reconnu et déclaré « esprit des esprits du feu », capturé avec de grandes cérémonies et des marques extérieures d’un très profond respect, et, finalement, enfermé dans un panier semblable à celui employé par les sâtas de l’Inde pour tenir leurs cobras.

Ce panier est porté, solennellement, à la souveraine lamaserie.

Dans cette dernière, au centre du temple, s’élève une sorte d’autel, dont le tabernacle est constitué par un petit four à réverbère, sous lequel on peut allumer un grand feu.

Le panier contenant le serpent est placé dans ce four. Puis, à grands coups de gongs et avec des vociférations qui n’ont rien d’humain, les gelongs, les gethuls et les bouddis se précipitent hors de la lamaserie pour appeler les fidèles qui accourent de tous côtés.

Depuis la mort corporelle du Dalaï-Lama, les paspas ont élu un chef provisoire qui exerce des fonctions rappelant celles du camerlingue de l’Église catholique pendant la vacance du siège pontifical. Ce chef des paspas adresse alors au peuple assemblé un discours pour expliquer que Bouddha n’a pas abandonné ses fidèles, qu’il ne faut plus se lamenter, que le moment est venu de quitter le deuil ; car l’esprit des esprits du feu n’avait abandonné la forme humaine que pour se réincarner dans un serpent, qui est là, au milieu du tabernacle, et il va de nouveau prendre bientôt une forme humaine, redevenir Dalaï-Lama.

Après des incantations, des cérémonies, au cours desquelles on brûle dans des cassolettes des parfums affreux, des résines, au lieu d’encens,