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Page:Taxil, Hacks, Le Diable au XIXe siècle, Delhomme et Briguet, 1894.djvu/316

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ce qui m’est arrivé ; et cela prouve bien à quel point sont fous ceux qui croient que dans la vie il est des événements qui sont l’effet du hasard. Tout est, au contraire, admirablement combiné, réglé par Dieu, soit qu’il ordonne, soit qu’il laisse faire. Nous n’avons pas, certes, à nous attribuer le mérite de nos œuvres ; soyons modestes, et reconnaissons qu’entre les mains du tout-puissant Créateur de toutes choses, nous sommes de simples et fragiles instruments.

Si les francs-maçons lucifériens y réfléchissaient, ils verraient, par le seul examen de mon cas, combien grande est leur erreur. Ils s’imaginent que la divinité est double et que Lucifer est l’égal d’Adonaï. Or, il est certain que tout, dans mon aventure, prouve l’impuissance de Satan contre Dieu, notre Dieu, à nous chrétiens, le seul et unique Dieu. Satan apparaît dans l’aréopage palladique de Calcutta ; il triomphe en se montrant ainsi à ses adorateurs, et son apparition coûte la vie au frère Georges Shekleton ; voilà une âme damnée pour lui, c’est probable. Mais, d’autre part, Carbuccia est terrifié de ce qu’il a vu ; il en devient malade ; l’ancien athée se prend à réfléchir, et c’est à un médecin catholique qu’il vient faire ses confidences. Ce catholique ne savait rien de ces horreurs, de ces infamies, bien que le Saint-Siège et les évêques les aient depuis longtemps dénoncées ; ainsi, voilà un témoin oculaire et auriculaire qui va surgir, et ce témoin sera un médecin ! C’est ce que faisait si justement ressortir M. le chanoine Anger-Billards, écrivant naguère ceci à mon sujet, dans l’Avant-Garde de l’Ouest : « En fait de diableries, les médecins sont les derniers à croire ; mais, quand ils y croient, on peut marcher après eux, l’histoire est bâtie à chaux et à sable. »

Je n’ai nullement à m’enorgueillir de ce que j’ai fait ni de ce que je ferai encore pour démasquer entièrement la secte infernale, pour lui arracher son dernier voile. Un autre que moi aurait pu être choisi, et certainement de mille fois plus dignes ne manquaient pas. Il ne fallait ni un avocat, ni un journaliste, ni tout autre homme incompétent ; il fallait un médecin. Sans aucun doute, les médecins catholiques sont nombreux. Pourquoi est-ce moi plutôt qu’un autre qui ai été marqué dans le livre du Destin pour effectuer cette formidable enquête et en livrer les résultats à l’indignation publique ? Cela est le côté mystérieux de mon histoire, la chose que je m’explique le moins ; car, lorsque je descends en moi-même, je vois combien peu je vaux. Mais je n’ai pas à approfondir ce point ; je constate, et je m’incline devant la volonté de mon Dieu.

Donc, Satan s’illusionnait, le jour où il apparaissait triomphant à ses fidèles de Calcutta. Cette rodomontade de l’archange déchu a amené, comme conséquence plus ou moins directe, la découverte, cette fois dûment et complètement constatée, de tout le spiritisme luciférien et