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Page:Taxil, Hacks, Le Diable au XIXe siècle, Delhomme et Briguet, 1894.djvu/319

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d’abord, que j’ai été en mesure de tout voir, de pénétrer partout ; je crois qu’à cet égard la preuve est faite. L’important est, maintenant, puisque je possède complètement tout le satanisme, puisque rien de la haute maçonnerie ne m’a été caché, l’important, dis-je, est de disséquer avec méthode messire Lucifer.

Les dates de mes visites à tel ou tel Directoire, à tel ou tel Suprême Conseil ou Grand-Orient, ne sont plus que des choses secondaires. Nous allons donc examiner les œuvres du satanisme contemporain, en les classant comme ferait un professeur, c’est-à-dire en divisant et subdivisant, conformément à l’ordre naturel des catégories de faits, et non d’après les époques de leur constatation.

Tout d’abord, il faut faire connaître l’organisation, le fonctionnement de la haute maçonnerie, celle qui, directement ou indirectement, tient tous les rites dans ses mains.

En premier lieu, je parlerai de Charleston, le centre du satanisme universel, et d’Albert Pike, le grand organisateur du palladisme.

Je suis allé deux fois à Charleston. La première, c’était en mars 1881. De Shang-Haï, j’étais rentré à Marseille, où j’arrivai dans la seconde huitaine de janvier. Après avoir raconté, sous le sceau du secret, au brave abbé Laugier, mon unique confident, une partie des abominations dont j’avais été le témoin (je ne lui dis pas tout, de crainte de trop l’épouvanter et pour ne pas avoir à lutter de nouveau contre son amitié), je demandai si la Compagnie et j’obtins un congé de trois mois et demi, afin de reprendre mon bateau à son retour. En réalité, j’avais à ma disposition un temps plus long. Je m’étais reposé trois bonnes semaines. Mon congé me menait jusqu’au 15 mai, époque du retour de mon bateau ; mais, à ce moment-là, il y avait encore vingt-huit jours à compter entre son arrivée et son nouveau départ, soit jusqu’à la seconde huitaine de juin. J’avais donc tout mon temps à moi pour pousser ma pointe en Amérique, en pouvant même prendre un bon repos suffisant de deux ou trois semaines avant de réembarquer pour la Chine.

Le jour même où mon bateau partait avec mon remplaçant, en direction de Shang-Haï, je prenais le train pour Paris, où je m’arrêtai sept jours. Le 17 ou le 18 février, je ne me rappelle plus au juste, j’étais au Havre, comme passager, à bord du transatlantique qui levait l’ancre pour New-York. Le 10 mars, j’arrivais à Charleston.


Charleston, la Venise américaine ! C’est, du moins, l’impression que produit la cité carolinienne, vue de la rade. Elle est pittoresquement située au confluent des deux rivières Ashley et Cooper, qui s’unissent pour former un vaste port de deux milles de large, communiquant avec