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Page:Taxil, Hacks, Le Diable au XIXe siècle, Delhomme et Briguet, 1894.djvu/779

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fait défaut ; le surnaturel s’est dérobé devant vos yeux clos ; et bientôt vous cessez d’y croire, car ce n’est plus que le naturel que vous cherchez, et encore vous cherchez à tâtons, vous exposant à toutes les plus funestes méprises.

Et alors, vous lançant sans flambeau dans une analyse fatalement fausse, tâtant dans les ténèbres les apparences simiesques de l’homme ou les apparences humaines du chimpanzé, impressionné malgré vous par le raisonnement artificieux de ces docteurs incrédules que vous êtes venus combattre dans ces bas-fonds, raisonnement qui à présent, comme une pieuvre, vous enlace de ces subtilités menteuses et déroutantes, vous vous dites, en cette seconde de bouleversement cérébral :

— L’erreur serait-elle dans la Bible ?

Oh ! pardon, mon Dieu ! pardon ! pardon !

… Soudain, je me sentis frapper doucement sur l’épaule. Je me retournai et restai bouche bée.

Nous n’avions pas de passagers à bord. Ce ne pouvait être donc qu’un de mes camarades ; mais je m’étais retiré seul pour veiller dans ma cabine, fermée avec soin au verrou.

Et pourtant, quelqu’un était auprès de moi.

Il me contemplait, avec un sourire étrange sur les lèvres. Je le regardais, stupéfait. C’était Athoïm-Olélath, le chef du laboratoire de Gibraltar.

Lentement, sa main quitta mon épaule. Il recule d’un pas, plongea ses yeux dans les miens ; puis, sa bouche laissa tomber ces paroles :

— Marche, marche vers la lumière. Hœckel et Darwin ne l’ont pas eue encore ; mais ils se sont acheminés, eux et leurs disciples, dans la voie qui conduit à l’ineffable clarté. L’erreur est dans la Bible ; l’erreur est aussi dans le matérialisme athée. Toutefois, la tradition biblique, c’est le piétinement sur place dans la boue du mensonge ; le matérialisme, qui foule aux pieds la superstition et s’en dégage par la science, c’est, malgré son erreur quant à la divinité, c’est l’envolée courageuse vers les sphères supérieures et infinies, où règne l’Être Suprême, le dieu vrai et raisonnable, le seul digne de ton amour et de ton adoration… Dieu est éternel, et il est dans tout. La nature est donc éternelle ; elle a existé de tout temps, elle existera toujours. Dieu existe, mais comme âme de la nature. Il n’y a pas en création, mais génération, transformation, organisation. Dans la divinité, comme dans tous les éléments de l’univers, il y a deux principes contraires, d’où résulte l’équilibre des forces éternelles : l’un tend à détruire, c’est le mal et le mensonge ; l’autre conserve et améliore sans cesse, c’est le bien et la vérité. Au vrai, raisonnable et seul Dieu-Bon, très haut le plus haut, architecte de la nature, à lui sont dus tes hommages… L’athéisme est une transition salutaire ; le dieu que l’athée