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Page:Taxil, Hacks, Le Diable au XIXe siècle, Delhomme et Briguet, 1894.djvu/832

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l’homme intérieur, et qui n’avons d’autres sentiments que deux que nous avons appris de Dieu même, c’est en vain que vous nous parlez ainsi. Finissez, et faites de nous ce que vous voudrez.

On disputa contre eux depuis la première heure du jour jusqu’à trois heures après midi, et l’on fit tous les efforts possibles pour les tirer de leur erreur.

Comme on les vit endurcis, on leur déclara que, s’ils ne changeaient, ils seraient aussitôt brûlés par ordre du roi et du consentement de tout le peuple. Ils dirent qu’ils ne craignaient rien et qu’ils sortiraient du feu sans aucun mal ; ils se moquaient même de ceux qui voulaient les convertir.

Alors, on les fit vêtir chacun des ornements de son ordre, et aussitôt les évêques les déposèrent.

La reine Constance, par ordre du roi, se tenait à la porte de l’église, de peur que le peuple ne se jetât dedans pour les tuer ; mais quand, au moment où on les faisait sortir, elle aperçut Étienne, qui avait été son confesseur, elle en fut si indignée, qu’elle lui creva un œil, d’une baguette qu’elle tenait à la main.

On les conduisit hors de la ville, sous une cabane où l’on avait allumé un grand feu. Ils y allaient gaîment, disant qu’ils ne désiraient autre chose. De treize qu’ils étaient, il n’y eut qu’un clerc et une religieuse qui se convertirent ; les autres furent brûlés, avec la poudre abominable dont il a été parlé.

Quand ils commencèrent à sentir le feu, ils se mirent à crier qu’ils avaient été trompés et qu’ils avaient en mauvaise compréhension de Dieu, Seigneur de l’univers. Quelques-uns des assistants, touchés de leurs cris, voulurent les retirer du feu ; mais il n’était plus temps, et ils furent tellement réduits en cendres qu’on ne trouva pas même leurs os.

On découvrit que le chantre de l’église d’Orléans, nommé Théodat, et mort trois ans auparavant, était de la même hérésie, suivant le témoignage des catholiques et des hérétiques mêmes. C’est pourquoi l’évêque Odalric le fit ôter du cimetière et jeter à la voirie.

On brûle de même ceux de cette secte qui furent trouvés ailleurs, particulièrement à Toulouse, comme témoigne Ademar, évêque d’Angoulême, auteur du temps. Il ajoute que ces émissaires de l’Ante-Christ étaient répandus en différentes parties de l’occident et se cachaient avec soin, séduisant tous ceux qu’ils pouvaient, hommes et femmes. Il les nomme expressément « manichéens », et dit qu’ils commettaient en secret des abominations qu’il n’est pas même permis de dire, et toutefois, à l’extérieur, ils feignaient d’être vrais.

On voit encore que c’étaient des manichéens ou gnostiques, par les