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Page:Taxil - Confessions d'un ex-libre-penseur - 1887 - Letouzey et Ané - 6e édition.djvu/9

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À quatre ans et demi, je fus placé, à titre d’externe, à une institution marseillaise, le pensionnat du Sacré-Cœur, rue Barthélémy.

Je me rappelle encore cette école comme si j’y étais.

Je portais alors la petite robe raccourcie des bébés. Nous étions une vingtaine de bambins, à qui la sœur Marie-Antoinette apprenait à lire ; nous lui donnions une fière besogne. Mais la bonne sœur avait une patience inimaginable, et elle était bonne, bonne ; elle nous aimait, comme si nous eussions été ses enfants.

Plus tard, je n’ai pas été le dernier des journalistes libres-penseurs à célébrer, avec toute l’indignation du parti pris, la férocité des sœurs qui font la classe aux fillettes ou aux petits garçons. La moindre chiquenaude, rapportée par une chronique, nous servait de prétexte à des déclamations dithyrambiques ; une oreille peu ou prou tirée, quel beau motif pour crier au rétablissement de la torture ! Mais je me gardais bien de parler de mes souvenirs personnels ; j’aurais été obligé d’avouer que la bonne sœur Marie-Antoinette, la sœur Bonbon, comme nous l’appelions, parce qu’elle avait toujours