Page:Tchékhov - Salle 6, trad Roche, 1922.djvu/30

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supérieur à André Efîmytch qui n’a plus de clientèle.

Il y a, dans un coin de la salle de consultation, une grande Image encadrée, devant laquelle pend une lourde lampe. Auprès, est un petit autel portatif, recouvert d’une housse blanche. Des portraits d’évêques, des vues du monastère de Sviatogorsk, et des couronnes sèches de bleuets sont suspendus aux murailles. Serge Serguiéitch est dévot et aime l’appareil religieux : l’Image a été mise à ses frais dans la salle de visite. Les dimanches, à son instigation, un malade lit à haute voix les litanies et après cette lecture, Serge Serguiéitch passe lui-même dans les salles avec un petit encensoir et encense les malades.

Comme il y a beaucoup de malades et qu’on a peu de temps, on se borne à un bref interrogatoire de chacun et on lui remet quelque remède vague, comme de la pommade calmante ou de l’huile de ricin. André Efîmytch est assis, pensif, la tête appuyée sur le poing, et pose des questions machinales. Serge Serguiéitch, assis lui aussi, se frotte les mains et intervient de temps à autre.

– « Nous souffrons et nous endurons la nécessité parce que nous invoquons mal la miséricorde de Dieu, déclare-t-il ; oui ! »

Durant toute la visite, André Efîmytch ne fait aucune opération. Il a perdu depuis longtemps