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Page:Thackeray - La Foire aux vanites 1.djvu/392

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— C’est que… j’ai demandé ma voiture, dit-il, et… des chevaux de poste. Isidore est allé les chercher.

— Vous prend-il donc fantaisie de vous promener au clair de la lune ? repartit mistress O’Dowd ; quant à elle, ce dont elle a le plus besoin, c’est son lit ; aussi je viens de la faire coucher.

— Allez la faire lever, il faut qu’elle se lève, s’écria Jos en frappant du pied avec force. J’ai demandé des chevaux, m’entendez-vous ? des chevaux de poste. La déroute est complète, et…

— Et après ? demande mistress O’Dowd.

— Eh bien ! je pars pour Gand, continua Jos. Tout le monde fait comme moi. Il y a une place pour vous dans ma voiture. Il faut que nous soyons en route dans une demi-heure. »

La femme du major lui jeta un regard de suprême mépris.

« Je ne bougerai pas, dit-elle, tant que je n’en aurai pas reçu l’avis d’O’Dowd. Partez, si tel est votre bon plaisir, monsieur Sedley ; mais, je vous le jure, je reste ici avec Amélia.

— Je veux qu’elle parte ! vociféra Joseph avec de nouveaux trépignements. »

Mistress O’Dowd, la main fièrement campée sur la hanche, barra la porte de la chambre à coucher.

« Vous êtes trop bon frère, en vérité, monsieur Sedley, lui dit-elle ; mais vous irez tout seul vous mettre sous les jupes de petite maman. Beaucoup de plaisir je vous souhaite, très-cher monsieur, et surtout débarquez sans naufrage, comme dit la chanson. Toutefois, si j’ai un conseil à vous donner, vous ferez bien de raser vos moustaches, ou elles pourraient vous jouer un vilain tour.

— Mille tonnerres !… » hurla Jos, partagé à la fois entre la crainte, la rage et le dépit.

Sur ces entrefaites, arriva Isidore.

« Pas un cheval dans cette diable de ville ! » maugréait le laquais furieux.

Les moindres quadrupèdes avaient été mis en réquisition, car Jos n’était pas le seul à écouter les inspirations de la peur.

Mais les terreurs de Jos, déjà si cruelles et si poignantes, devaient atteindre avant peu aux dernières limites. Pauline, la