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Page:Thibaudet – Trente ans de vie française – Volume I.djvu/73

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des sciences, y cherchant comme Châteaubriand de grands spectacles ou comme M. Barrès une discipline.

MOI. — Ce ne serait point si ridicule… Mais alors nous disputerions sans fin, à moins de finir par disputer sans raison. Les ombres qui grandissent du sommet des montagnes nous ramènent au repos. Retenons si vous voulez bien que vous avez apporté de l’atmosphère provençale ou que vous installez en elle par une harmonie préétablie le goût et l’usage des idées claires, solides et bien découpées. Ne scrutons pas leur origine, ne cherchons pas d’où vous les voyez, ; mais comment vous les voyez, acceptons-les comme une sculpture grecque « idée d’une extrême richesse de mouvements, de passion, d’élans et de forces, mais arrêtés, mais définis étant à leur comble[1] ».

IV
LE STYLE

Pour aller de la sensibilité aux idées d’un auteur, le chemin le meilleur et le plus agréable c’est la ligne de son style. Le style c’est l’homme, nous disons-nous d’abord pour nous encourager. Mais ensuite c’est l’homme tout entier que nous arrivons à définir comme un style.

Aucun style ne se tient plus que celui de M. Maurras dans le sillage de la pensée qui lui donne naissance. Il s’est formé un peu moins vite que celui de M. Barrès. Sa première œuvre, le Chemin de Paradis, est écrite dans une forme grêle et tendue, encore en état de croissance adolescente. Il atteint son point de maturité, de tièdes et riches couleurs qu’il ne retrouvera pas toujours, dans cette Anthinea qui occupe chez lui à peu près la place de Du Sang, de la Volupté et de la Mort chez M. Barrès. Telle page sur la Corse vue de la mer[2]

  1. Quand les Français ne s’aimaient pas, p. 355.
  2. Anthinea. p. 123.