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Page:Tinayre - La Rancon.djvu/228

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— Je porterai la dépêche en allant chercher ma trousse ; cela nous fera gagner du temps.

Jacqueline écrivit le texte de la dépêche, puis elle remonta auprès du malade. L’odeur des antiseptiques, doucement, l’engourdissait. Dans le jardin, les arbres commençaient à jaunir. Un vent frais faisait trembler leurs cimes blondes. C’était un crépuscule de fin d’été, calme et tiède. Ah ! par un soir si beau, devant les arbres dorés et le ciel rose, ce n’était pas vrai qu’on pût mourir. L’affreuse conviction ne pénétrait pas l’âme de Jacqueline, novice au spectacle de la mort. Certes, l’inquiétude était en elle, comme un clou enfoncé qui éveille à chaque mouvement une douleur lancinante, mais elle espérait, elle voulait espérer. Le docteur était savant et sagace. Et puis Chartrain allait venir. Il semblait à la pauvre femme que le dévouement d’Étienne achèverait la guérison de Paul et obtiendrait un miracle de la force inconnue qui gouverne la vie et la mort. Dieu ! Elle y pensait à peine, dans ses joies et ses chagrins de chaque jour, point religieuse, indifférente au grand problème des origines et des causes. Pourtant, à l’heure des suprêmes angoisses, comme naguère dans les affres de l’enfantement, elle se prenait à implorer la pitié des puissances