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Page:Tinayre - La Rancon.djvu/246

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tion tout à fait secondaire. Que suis-je dans votre vie, moi ?

Elle baissa la tête, dans l’ombre. Puis s’arrêtant au milieu du chemin, parmi les ronces et les cailloux, elle s’écria désespérée :

— Ah ! je le sens, tu souffres. Tu me trouves dure, indifférente. Les mots qui consolent, je ne sais plus les dire. J’ai trop souffert. J’ai le cœur meurtri. L’épouvante a tari en moi les sources de la tendresse et de l’émotion. Je n’ai pas la force de te rendre heureux et je n’ai plus celle d’être heureuse.

— Mais tu es toujours ma Jacqueline, supplia-t-il, tu m’aimes encore, n’est-ce pas ? Rien n’est changé. Nous nous retrouverons tels que nous étions avant ce cauchemar horrible. Tu me reviendras, ma vie, ma joie, mon unique amour !

Elle se dégagea de son étreinte et d’un geste farouche le repoussa :

— Chut ! ne me parlez pas de cela… Vous ne savez pas, vous ne pouvez pas savoir… Taisez-vous, par pitié, si vous m’avez aimée.

Il obéit. Le vent fraîchissait. Ils redescendirent vers l’avenue, dans la pénombre transparente. L’âme de Chartrain était pleine de la tristesse