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Page:Tinayre - La Rancon.djvu/258

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— Mon cher Quérannes, supposons que tu sois marié, trompé et généreux… Tu relèves la femme, tu l’absous, tu la purifies… Mais si elle aime l’amant…

— Si une femme garde quelque lueur de sens moral, malgré sa faute, elle ne peut que comparer la générosité de l’époux à la platitude de l’amant — car l’amant, le voleur, l’intrus, celui qui dérobe et qui ment, aura toujours le vilain rôle…

— Pas pour sa maîtresse, dit Vallier. Avec ça qu’une femme éprise a tant de sens moral ! Elle aime un homme. Il lui faut cet homme. Toute votre grandeur d’âme ne vaut pas un cheveu de son bien-aimé.

Lachaume se taisait. Quérannes reprit avec une animation singulière :

— Si j’aimais une femme, je préférerais renoncer à elle que de la partager… J’excuse pourtant les amants coupables quand le mari s’est rendu odieux par d’injustes brutalités. J’excuse même ces surprises des sens qui jettent une honnête femme au bras d’un amoureux, chute unique, sans récidive, qu’un repentir immédiat peut effacer. Mais vous, Moritz, vous, Chartrain, vous-même, Vallier, ne réprouvez-vous pas le mensonge de tous les instants, la trahison installée au foyer