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Page:Tissandier - Voyages dans les airs - 1885.djvu/35

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tête sans ambitionner la joie du voyageur assis dans la nacelle soutenue par une bulle de gaz. Voyez cet aérostat gracieux, dont les flancs arrondis sont tendus par l’expansion du gaz (fig. 13) : comme il se berce doucement au-dessus des nuages floconneux, des filaments de vapeur que les flots invisibles de l’air découpent avec mille caprices ! Qui n’a senti le désir d’abandonner un instant la terre boueuse pour aspirer à pleins poumons l’air des hautes régions, les espaces atmosphériques où ne montent jamais les bruits des cités, où le calme et la solitude règnent en maitres, où les rayons argentés du soleil colorent les légions de nuages qui se meuvent dans les plaines éthérées ? Il ne faut pas s’étonner si les premiers aéronautes ont exagéré l’importance des facultés nouvelles qu’ils venaient de conquérir ; et nous ne saurions blâmer cette compagne aérienne de Lunardi qui, en racontant ses impressions de voyage en ballon, s’écrie avec un enthousiasme quelque peu timoré : « Lorsque je me renferme en moi-même et que je réfléchis sur ce que j’ai fait, je suis frappée d’une espèce de terreur, en songeant que j’ai été assez audacieuse pour me placer moi-même en face de l’Éternel avant qu’il m’y ait appelée. » Soyons indulgents à l’égard de ces explorateurs qui, entraînés par l’admiration, oubliaient que les hauteurs qu’ils ont pu