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Page:Tocqueville - Œuvres complètes, édition 1866, volume 2.djvu/220

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Bientôt après, un prêtre, revêtu de ses habits ecclésiastiques, s’avança sur le bord de l’estrade destinée aux orateurs. Les assistants, après s’être découverts, se tinrent debout en silence, et il parla en ces termes :

« Dieu tout-puissant ! Dieu des armées ! toi qui as maintenu le cœur et conduit le bras de nos pères, lorsqu’ils soutenaient les droits sacrés de leur indépendance nationale ; toi qui les as fait triompher d’une odieuse oppression, et as accordé à notre peuple les bienfaits de la paix et de la liberté, ô Seigneur ! tourne un œil favorable vers l’autre hémisphère ; regarde en pitié un peuple héroïque qui lutte aujourd’hui comme nous l’avons fait jadis et pour la défense des mêmes droits ! Seigneur, qui as créé tous les hommes sur le même modèle, ne permets point que le despotisme vienne déformer ton ouvrage et maintenir l’inégalité sur la terre. Dieu tout-puissant ! veille sur les destinées des Polonais, rends-les dignes d’être libres ; que ta sagesse règne dans leurs conseils, que ta force soit dans leurs bras ; répands la terreur sur leurs ennemis, divise les puissances qui trament leur ruine, et ne permets pas que l’injustice dont le monde a été le témoin il y a cinquante ans se consomme aujourd’hui. Seigneur, qui tiens dans ta main puissante le cœur des peuples comme celui des hommes, suscite des alliés à la cause sacrée du bon droit ; fais que la nation française se lève enfin, et, sortant du repos dans lequel ses chefs la retiennent, vienne combattre encore une fois pour la liberté du monde.