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Page:Tocqueville - Œuvres complètes, édition 1866, volume 2.djvu/436

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semble le caractère distinctif de leur race, ni éteindre tout à fait les lumières qui les éclairent.

Ainsi, au milieu de l’incertitude de l’avenir, il y a du moins un événement qui est certain. À une époque que nous pouvons dire prochaine, puisqu’il s’agit ici de la vie des peuples, les Anglo-Américains couvriront seuls tout l’immense espace compris entre les glaces polaires et les tropiques ; ils se répandront des grèves de l’océan Atlantique jusqu’aux rivages de la mer du Sud.

Je pense que le territoire sur lequel la race anglo-américaine doit un jour s’étendre égale les trois quarts de l’Europe[1]. Le climat de l’Union est, à tout prendre, préférable à celui de l’Europe ; ses avantages naturels sont aussi grands ; il est évident que sa population ne saurait manquer d’être un jour proportionnelle à la nôtre.

L’Europe, divisée entre tant de peuples divers ; l’Europe, à travers les guerres sans cesse renaissantes et la barbarie du Moyen Âge, est parvenue à avoir quatre cent dix habitants[2] par lieue carrée. Quelle cause si puissante pourrait empêcher les États-Unis d’en avoir autant un jour ?

Il se passera bien des siècles avant que les divers rejetons de la race anglaise d’Amérique cessent de pré-

  1. Les États-Unis seuls couvrent déjà un espace égal à la moitié de l’Europe. La superficie de l’Europe est de 500,000 lieues carrées ; sa population de 205,000,000 d’habitants. Malte-Brun, vol. VI, liv. CXIV, page 4.
  2. Voyez Malte-Brun, vol. VI, liv. CXVI, page 92.