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Page:Tocqueville - Œuvres complètes, édition 1866, volume 2.djvu/98

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citoyens voient un homme qui sort de leurs rangs et qui parvient en peu d’années à la richesse et à la puissance ; ce spectacle excite leur surprise et leur envie ; ils recherchent comment celui qui était hier leur égal est aujourd’hui revêtu du droit de les diriger. Attribuer son élévation à ses talents ou à ses vertus est incommode, car C’est avouer qu’eux-mêmes sont moins vertueux et moins habiles que lui. Ils en placent donc la principale cause dans quelques-uns de ses vices, et souvent ils ont raison de le faire. Il s’opère ainsi je ne sais quel odieux mélange entre les idées de bassesse et de pouvoir, d’indignité et de succès, d’utilité et de déshonneur.


de quels efforts la démocratie est capable.

L’Union n’a lutté qu’une seule fois pour son existence. — Enthousiasme au commencement de la guerre. — Refroidissement à la fin. — Difficulté d’établir en Amérique la conscription ou l’inscription maritime. — Pourquoi un peuple démocratique est moins capable qu’un autre de grands efforts continus.

Je préviens le lecteur que je parle ici d’un gouvernement qui suit les volontés réelles du peuple, et non d’un gouvernement qui se borne seulement à commander au nom du peuple.

Il n’y a rien de si irrésistible qu’un pouvoir tyrannique qui commande au nom du peuple, parce qu’étant revêtu de la puissance morale qui appartient aux volontés du plus grand nombre, il agit en même temps avec la décision, la promptitude et la ténacité qu’aurait un seul homme.