Page:Tolstoï - Œuvres complètes, vol24.djvu/255

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auraient mangé ce qu’ils avaient ; ils auraient mangé tout, par gloutonnerie, ou par avidité pour ne rien laisser. Les avares auraient peut-être rapporté les restes à la maison. Ceux qui n’avaient rien seraient restés affamés, épiant avec haine et envie les mangeurs ; quelques-uns d’entre eux auraient peut-être volé des provisions à ceux qui s’en étaient munis, provoquant ainsi des querelles et des rixes, et les uns s’en seraient retournés chez eux repus, et les autres affamés et irrités ; exactement comme cela se passe dans notre monde.

Mais Christ savait ce qu’il voulait faire (comme il est dit dans l’Évangile) ; il ordonna à tous de s’asseoir en cercle, engagea ses disciples à offrir leurs provisions à ceux qui n’avaient rien, et recommanda aux autres d’agir de même. Quand tous ceux qui avaient des provisions eurent suivi l’exemple des disciples du Christ, c’est-à-dire eurent offert aux autres ce qu’ils avaient, il arriva que tout le monde ayant mangé modérément, il resta encore assez de vivres pour les premiers qui n’avaient pas mangé. Tout le monde fut ainsi rassasié, et il resta assez de victuailles pour remplir douze paniers.

Christ enseigne aux hommes à agir dans la vie selon la raison et la conscience ; car c’est la loi de l’être raisonnable pris séparément comme celle de toute l’humanité. Le travail est la condition iné-