Page:Tolstoï - Œuvres complètes, vol26.djvu/230

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royaume de Dieu parce qu’il était riche ; qu’il est plus facile à un chameau de passer par le trou d’une aiguille qu’au riche d’entrer au royaume de Dieu. Il a dit que celui qui ne quitterait pas tout : maison, enfants, champs, pour le suivre, n’était pas son disciple. Il a raconté la parabole du riche qui ne faisait rien de mal, comme nos riches, qui seulement s’habillait, mangeait et buvait très bien et laissait périr son âme, et du mendiant Lazare qui n’a rien fait de bon, mais fut sauvé seulement parce qu’il était mendiant.

Cette vérité, m’était assez connue, mais les doctrines mensongères du monde l’avaient tant obscurcie que, pour moi, elle était devenue précisément une théorie au sens qu’on aime attribuer à ce mot, c’est-à-dire, paroles vides. Mais dès que j’eus réussi à détruire, dans ma conscience, le sophisme de la doctrine mondaine, la théorie se confondit tellement avec la pratique et la réalité de ma vie et de celle de tous les hommes qu’elle en devint son résultat forcé.

J’ai compris que l’homme, outre la vie pour son bien personnel, doit inévitablement contribuer au bien des autres, que si l’on prend la comparaison du monde animal, comme quelques-uns aiment à le faire, en justifiant la violence et la lutte, par la lutte pour l’existence, alors il faut faire la comparaison avec les animaux sociaux, comme les abeilles, et c’est pourquoi l’homme, sans parler