Page:Tolstoï - Œuvres complètes, vol26.djvu/233

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et d’un coup me délivre de ces souffrances morales que j’ai éprouvées en vue de la misère et de la dépravation des hommes, et d’un coup détruit les trois causes d’impossibilité d’aider les malheureux, auxquelles j’étais arrivé en cherchant les causes de mon insuccès.

La première cause était l’entassement des hommes dans les villes et l’engloutissement par les villes des richesses de la campagne. Il faut seulement que l’homme ne désire pas jouir du travail d’un autre en servant le gouvernement, en possédant de la terre et de l’argent, et par suite, selon ses capacités satisfasse lui-même à ses propres besoins, qu’il ne lui vienne jamais en tête de quitter la campagne (où il est plus facile de satisfaire ses besoins) et de partir en ville où tout ce qu’il y a est le produit du travail des autres, où il faut tout acheter. Alors, à la campagne, l’homme pourra secourir les besogneux et n’éprouvera pas ce sentiment d’abandon que j’avais éprouvé en ville en désirant aider les hommes non par mon travail, mais par celui des autres.

La deuxième cause était la désunion des riches et des pauvres. Il faut seulement que l’homme ne désire pas profiter du travail d’un autre par le service, par la possession de la terre et de l’argent et il sera placé dans la nécessité de satisfaire lui-même à ses propres besoins et, aussitôt, de soi-même, tombera ce mur qui le sépare du peuple tra-