Page:Tolstoï - Œuvres complètes, vol26.djvu/346

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intellectuels, si on nous impose de telles exigences, simples et légitimes ? Avec quoi les satisferons-nous ? Par le catéchisme de Philarète, par l’histoire sainte de Sokolov, par les images des divers couvents et de la cathédrale de saint Isaac, pour satisfaire ses besoins religieux ; par le code des lois, les œuvres de divers ressorts de la Cour de cassation, par divers statuts de divers comités et commissions, pour satisfaire son besoin d’ordre social ; par l’analyse spectrale, la mensuration de la voie lactée, la géométrie imaginaire, les études microscopiques, les discussions des spirites et des occultistes, par les travaux de l’Académie des Sciences, pour la satisfaction de ses besoins scientifiques. Avec quoi satisferons-nous ses besoins artistiques ? par Pouschkine, Dostoievsky, Tourgueniev, L. Tolstoï ? Par les tableaux du salon français et de nos peintres qui dessinent des femmes nues, de la soie, du velours, des paysages et du genre, par la musique de Wagner et nos musiciens ? Tout cela ne va pas et ne peut aller, parce que nous, avec notre droit à la journée de travail du peuple et l’absence de tous les devoirs, dans notre préparation de la nourriture spirituelle, nous avons tout à fait perdu de vue l’unique destination de notre activité. Nous ne savons même pas ce qui est nécessaire au peuple ouvrier.

Nous avons même oublié sa façon de vivre, ses opinions, sa langue. Nous avons même oublié le peuple lui-même, et nous l’étudions comme une