Page:Tolstoï - Œuvres complètes, vol26.djvu/412

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travaille s’associe naturellement au groupe des hommes travailleurs.

À la question de savoir si ce travail n’englobera pas tout mon temps et ne me privera pas de la possibilité de cette activité intellectuelle que j’aime, à laquelle je suis habitué, et que, dans les moments de doute, je trouve inutile, la réponse était la plus imprévue. L’énergie de l’activité intellectuelle s’est accrue et continuait de s’accroître régulièrement en s’affranchissant du superflu, au fur et à mesure de la tension du travail physique.

Il se trouvait qu’en consacrant au travail physique huit heures, la moitié de la journée qu’autrefois je passais dans les efforts pénibles de la lutte contre l’ennui, il me restait encore huit heures sur lesquelles il m’en fallait seulement cinq, d’après les conditions de mon travail intellectuel. Il se trouvait que si moi, un écrivain très fécond qui, pendant près de quarante ans, n’ai fait qu’écrire et ai écrit trois cents feuilles d’imprimerie, si j’eusse travaillé durant ces quarante années avec le peuple ouvrier, alors, sans compter les soirées d’hiver et les jours fériés, si j’avais lu et étudié cinq heures chaque jour, et si pendant les fêtes, je n’avais écrit que deux pages par jour (et j’écris une feuille d’imprimerie par jour), alors j’aurais eu les mêmes trois cents feuilles pendant quatorze ans.

Il en résultait une chose étonnante : le plus simple calcul arithmétique, que peut faire un