Page:Tolstoï - Œuvres complètes, vol26.djvu/462

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

aux hommes par Dieu et vous en connaissez la vraie récompense. Vous connaissez la béatitude qu’il donne.

Vous la connaissez quand, après les joies de l’amour, avec émotion, crainte et espoir, vous êtes en cet état inquiet de la grossesse qui vous tiendra malade neuf mois, qui vous mènera au bord de la tombe, à des souffrances atroces ; vous connaissez la condition du vrai travail, quand, avec joie, vous attendez l’approche et l’augmentation des souffrances les plus terribles après lesquelles se produit la béatitude que vous seules connaissez.

Vous la connaissez quand, aussitôt après des souffrances ininterrompues, vous prenez d’autre travail et d’autres souffrances, l’allaitement, pour quoi vous renoncez d’un coup et soumettez à votre sentiment, le besoin humain le plus fort, le besoin du sommeil (qui, selon le proverbe, est plus cher que père et mère), et des mois et des années entières vous ne dormez pas une seule nuit et parfois, et très souvent, vous ne dormez pas de toute la nuit, et marchez en tenant sur vos bras fatigués, et le berçant, l’enfant malade qui vous déchire le cœur. Quand vous faites tout cela, que personne ne loue, ne voit, sans en attendre de louanges ou de récompenses, quand vous le faites, non comme un acte héroïque, mais comme l’ouvrier de l’évangile qui revient du champ, en considérant que vous n’avez fait que votre devoir, alors vous savez ce qui est le