Page:Tolstoï - Œuvres complètes, vol26.djvu/496

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rale où j’étais tombé en prenant l’argent pour la représentation du travail. Je me suis convaincu par l’expérience que l’argent n’est pas la représentation du travail mais, dans la plupart des cas, la représentation de la force ou de ruses particulières et compliquées, basées sur la force.

L’argent, en notre temps, a déjà perdu tout à fait ce sens si désirable de représentation : il ne l’a plus que par exception, et, en règle générale, il est devenu le droit ou la possibilité de profiter du travail des autres.

L’extension de l’argent, du crédit et de toutes sortes de monnaies confirme de plus en plus cette signification de l’argent. L’argent, c’est la possibilité ou le droit de profiter du travail des autres ; l’argent c’est une nouvelle forme de l’esclavage qui ne se distingue de l’ancienne forme que par l’impersonnalité, par la suppression de tous les rapports humains avec les esclaves.

L’argent, c’est l’argent : une valeur toujours égale à elle-même et qui est considérée comme absolument régulière et légale et dont la jouissance n’est pas jugée immorale comme celle du droit d’esclavage. Dans ma jeunesse le jeu de loto fut implanté au cercle ; tous se mirent à jouer ce jeu et beaucoup y perdirent de l’or, s’y ruinèrent ; ils faisaient le malheur de leur famille, perdirent l’argent des autres ou du Trésor, et se suicidèrent. Et le jeu fut interdit, il l’est jusqu’à présent. Je me