Page:Tolstoï - Œuvres complètes, vol36.djvu/223

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de couper sur ses titres ; elle avait choisi un coupon de deux roubles cinquante, y avait ajouté deux pièces de vingt kopeks, et une pièce de dix kopeks et avait remis le tout à l’huissier.

L’huissier appela le gardien et lui transmit la somme en présence de la dame.

— Je vous en prie, remettez-le lui bien, — dit Caroline Albertovna au gardien.

Celui-ci était vexé d’une telle méfiance, et, pour cette raison, avait parlé avec humeur à Maslova.

Maslova était enchantée de cet argent, qui allait lui permettre de réaliser son désir.

« Pourvu que je puisse vite me procurer des cigarettes », se dit-elle ; et, dans cet unique désir de fumer, se concentraient toutes ses pensées. Elle en avait si grande envie qu’elle aspirait avidement l’air, dès qu’elle y sentait l’odeur du tabac, qui entrait dans le couloir par la porte du cabinet du juge. Mais elle dut attendre longtemps, le greffier, chargé de pourvoir au transfert des condamnés du tribunal à la prison, les ayant oubliés, tandis qu’il discutait avec un avocat l’article du journal prohibé.

Enfin, vers cinq heures, on fit partir Maslova entre ses deux gardiens, celui de Nijni-Novgorod et le Tchouvache, qui la firent sortir par une porte de derrière du Palais. Dans le vestibule du tribunal elle leur avait donné vingt kopeks, en les