Page:Tolstoï - Œuvres complètes, vol36.djvu/309

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— Je sais qu’il vous est difficile de me pardonner — commença Nekhludov ; et de nouveau il s’arrêta, sentant les larmes lui monter aux yeux. Puis il reprit : — Mais s’il ne m’appartient pas de réparer le passé, du moins suis-je résolu à faire tout ce que je pourrai. Dites-moi…

— Comment m’avez-vous trouvée ? dit-elle, et son regard loucheur était fixé sur lui.

« Mon Dieu ! Aide-moi. Enseigne-moi ce que je dois faire », se disait Nekhludov en regardant son visage changé et maintenant mauvais.

— C’est avant-hier, — dit-il, — j’étais juré quand on vous a jugée. Vous ne m’avez pas reconnu ?

— Non, pas du tout. Ce n’était guère le moment de reconnaître. Et je n’ai même pas regardé, — répondit-elle.

— Il y a eu un enfant ? — demanda Nekhludov se sentant rougir.

— Il est mort aussitôt, Dieu merci ; — répondit-elle d’une voix brève et méchante, en détournant de lui les yeux.

— De quoi, comment ?

— J’étais malade moi-même et j’ai manqué mourir, — dit-elle sans lever les yeux.

— Comment se fait-il que mes tantes vous aient renvoyée ?

— Garde-t-on une femme de chambre avec un enfant ? Sitôt quelles m’ont vue enceinte, elles