Page:Tolstoï - Œuvres complètes, vol4.djvu/112

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qu’ils croyaient de leur devoir de prendre. Au contraire Kalouguine et le colonel, bien qu’ils fussent de braves gens, étaient disposés à voir chaque jour une affaire pareille pour recevoir chaque fois le sabre d’or et le titre de général-major. J’aime entendre traiter de monstre le conquérant qui, par ambition personnelle, perd des milliers d’hommes. Mais interrogez en conscience le sous-lieutenant Petrouchov et le lieutenant Antonov et d’autres, chacun de nous est un petit Napoléon, un petit monstre et peut évidemment faire une bataille, tuer une centaine d’hommes, rien que pour recevoir une autre étoile ou un tiers d’appointements d’indemnité.

— Non, excusez — disait le colonel. — L’affaire a commencé par le flanc gauche. Mais j’y étais donc.

— Peut-être, répondit Kalouguine. Moi j’étais davantage au flanc droit. J’y suis allé deux fois. Une fois pour chercher le général et l’autre fois comme ça pour regarder les logements. Voilà où ça chauffait !

— Oui, assurément, Kalouguine sait — dit le prince Galtzine au colonel. — Tu sais, aujourd’hui B… m’a dit de toi que tu es très brave…

— Mais les pertes, ah ! elles sont terribles ! — dit le colonel. — Dans mon régiment quatre cents soldats sont tués. C’est étonnant que j’en sois sorti vivant.

À ce moment à l’autre bout du boulevard et ve-