Page:Tolstoï - Œuvres complètes, vol7.djvu/119

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Le prince Vassili réfléchit, et fronça les sourcils. Anna Mikhaïlovna comprit qu’il craignait de trouver en elle une rivale pour le testament du comte Bezoukhov. Elle se hâta de le rassurer.

— Si ce n’était ma véritable affection et mon dévouement pour mon oncle, fit-elle avec assurance et d’un ton négligent, je connais son caractère noble, droit, mais près de lui si les princesses restent seules… elles sont encore jeunes… Elle inclina la tête et ajouta en chuchotant : — A-t-il accompli ses derniers devoirs, prince ? Comme ces derniers moments sont précieux ! Cela ne lui fera pas de mal ; il est nécessaire de le préparer s’il est si mal. Prince, nous autres, femmes (elle sourit tendrement) nous savons toujours comment parler de ces choses. Il est nécessaire que je le voie, si triste que ce soit pour moi, mais je suis déjà habituée à souffrir.

Le prince comprit très bien, comme à la soirée d’Annette Schérer, qu’il serait difficile de se débarrasser d’Anna Mikhaïlovna.

— Mais cette entrevue ne sera-t-elle pas pénible pour lui, chère Anna Mikhaïlovna ? — dit-il. — Attendons jusqu’au soir, le docteur prévoit une crise.

— Mais prince, on ne peut attendre en un tel moment. Pensez, il y va du salut de son âme… Ah ! c’est terrible les devoirs d’un chrétien.

La porte des appartements intérieurs s’ouvrit,