Page:Tolstoï - La Sonate à Kreutzer trad Pavlovsky.djvu/235

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dans le crime, pour que cet excès même d’audace prouve son innocence !… Tout est clair. Nul doute. » Je ne craignais qu’une chose : qu’ils ne s’enfuient chacun de son côté, qu’ils n’inventent quelque nouveau mensonge et ne me privent de preuve matérielle et de la joie douloureuse de punir, oui, de les exécuter.

Et, pour les surprendre plus vite, je me dirigeai sur la pointe des pieds, vers la salle à manger, non par le salon, mais par le corridor et les chambres des enfants. Dans la première chambre dormait le petit garçon : dans la seconde la vieille bonne remua et sembla vouloir se réveiller, et je me représentai ce qu’elle penserait quand elle saurait tout, et la pitié pour moi-même me poigna tellement que je ne pus retenir des larmes. Pour ne pas éveiller les enfants, je m’enfuis à pas légers par le corridor dans mon cabinet de travail. Je me laissai tomber sur le canapé et je sanglotai. « Moi, honnête homme, moi, fils de mes parents, moi, qui toute ma vie ai rêvé le bonheur dans la famille, moi, qui