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Page:Tolstoï - Ma religion.djvu/10

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rieur, d’une nature bien différente. Rien de systématique, de méthodique, mais une clarté soudaine qui me fit apparaître la vraie doctrine évangélique dans toute sa simple beauté.

Ce fut quelque chose de semblable à ce qui arriverait à un homme qui chercherait en vain, d’après un dessin erroné, à restaurer une statue avec un tas de petits morceaux de marbre et qui, soudain, devinerait, d’après un des plus grands morceaux, qu’il s’agit d’une tout autre statue ; il se mettrait alors à en recomposer une nouvelle, et, au lieu du désaccord primitif, il trouverait, en suivant les sinuosités de chaque débris, comment ces morceaux se raccordent entre eux pour former un tout.

C’est exactement ce qui m’arriva et c’est ce que je veux raconter.

Je veux dire comment je trouvai la clef du vrai sens de la doctrine de Jésus, et comment le doute fut absolument chassé de mon âme par la vérité.

Voici comment je fis cette découverte : Depuis mon enfance, depuis que je commençais à lire l’Évangile, ce qui me touchait et m’attirait le plus, était la partie de la doctrine de Jésus où il enseigne l’amour, l’humilité, l’abnégation et le devoir de rendre le bien pour le mal.

Telle a toujours été pour moi la substance du christianisme ; mon cœur y reconnut la vérité malgré mon scepticisme et mon désespoir, et c’est là ce qui me porta à me soumettre une religion confessée par toute une population laborieuse qui y trouve le sens de la vie, ― à la religion enseignée par l’Église orthodoxe. Mais, en faisant ma soumission à cette Église, je m’aperçus bientôt que je ne trouverais pas dans sa doctrine la confir-