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Page:Tolstoï - Ma religion.djvu/107

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Ainsi se confirma pour moi encore de tous côtés le sens simple, clair, important et pratique des paroles de Jésus. Encore, au lieu d’une sentence vague, je trouvais une règle claire, précise, importante et facile à pratiquer : « Ne point faire de différence entre compatriotes et étrangers et s’abstenir de tout ce qui en résulte : de l’hostilité envers les étrangers, des guerres, de toute participation à la guerre, de tous préparatifs de guerre ; mais établir avec tous, de quelque nationalité qu’ils soient, les mêmes rapports qu’avec ses compatriotes.

Tout cela était si simple et si clair, que je m’étonnais de n’avoir pas pu le saisir d’emblée.

La cause de mon aberration était ici la même qu’à propos des passages sur le jugement et le serment. Il est très difficile de croire que ces tribunaux inaugurés par des Te Deum chrétiens, bénits par ceux qui se considèrent les gardiens de la loi de Jésus, soient incompatibles avec la religion chrétienne, lui soient diamétralement opposés. Il est encore plus difficile de croire que ce même serment que nous font prêter les gardiens de la loi de Jésus est directement réprouvé par cette loi. Admettre que ce qui, dans notre vie, est considéré comme essentiel et naturel, comme ce qu’il y a de plus beau et de plus grand : — l’amour de la patrie, sa défense, sa gloire, la lutte avec ses ennemis, etc. ; admettre que tout cela est non seulement une infraction à la loi de Jésus, mais encore un désaveu complet de Jésus, — en vérité, je le répète, c’est difficile.

Notre existence se trouve aujourd’hui en telle contradiction avec la doctrine de Jésus, que nous avons une peine énorme à la comprendre. Nous avons été tellement