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Page:Topffer - Nouveaux voyages en zigzag Grande Chartreuse, 1854.djvu/421

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mes bons amis, courez les bourgades, entrez dans les boutiques, mêlez-vous aux obscurs, aux petits, et très-souvent vous trouverez par là du mauvais tabac et des vertus de première qualité !

En quittant Faverge, l’on s’engage dans le beau vallon d’Uzine. Partout d’éclatants herbages ; puis, autour des fermes, de gras potagers, un désordre d’arbres fruitiers, de ceps qui, d’un rameau à des solives, ou s’étendent en treille, ou serpentent en festons. Au-dessus, des coteaux paisibles, des tabernacles de verdure où l’on s’étonnerait de ne pas voir sous chacun quelque sage, quelque philosophe achevant sa carrière loin du monde et du bruit, s’il n’était reconnu que, moins qu’un autre encore, un philosophe se passe de monde et de bruit.

Et puis, attendez, le voici, notre philosophe ; mais ce n’est pas M. Cousin, c’est un bonhomme qui, assis sous l’ombrage à deux pas de sa hutte, y recoud sa culotte. Comme nous regardons curieusement cette cabane misérable… « Je me la suis bâtie, nous dit-il, et on vit là tout de même. — Mais l’hiver ? — L’hiver ? je couche dans cette autre qui est en pierre, j’y fais aussi ma cuisine, et puis, quoi ? je recouds ma culotte. — Vous avez l’air heureux. — Oh ! la, que voulez-vous, c’est pas de plaindre qui enrichit. — Mais quel est votre métier ? — Mon métier ? J’attends du charbon qu’ils font par là haut, et puis, quand il vient, je le mesure. Voilà tout. — Eh bien, conservez-vous gai et content, et voici,