Aller au contenu

Page:Toulet - Les Tendres Ménages, 1904.djvu/214

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

qu'un de mes amis, mauvaise langue, prétend que c'est d'avoir le mal du pays.

«Il y avait là les figurants ordinaires. Le gros Loïserand, déjà excité par le Champagne qu'il représente, embrassait les garçons de café à tour de bras. Nicaëli, ce Portugais vert, servait, auprès de deux dames, d'interprète à la flamme de deux étrangers. Le vieux monsieur suisse, qui tombe en catalepsie tout de son long quand il a trop bu, l'oeil hagard, épiait fixement le vide, embusqué derrière un pilier; et deux morphinomanes couleur de terre, homme et femme assis à la même table, se regardaient tristement sans rien dire. Bref, la fête battait son plein: on avait envie de pleurer.

«Une petite juive nous accosta, laide, mais toute alourdie encore et reluisante des récentes dépouilles d'un jeune duc. Elle se nomme Judith Moche, et on l'appelle Julie d'Épernon, sous prétexte qu'un grand nom n'a jamais été déshonoré par une cocotte, ni par un cheval.

«--Bénédicte sois-tu, lui dis-je. Aïcher, fortune, désir.