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Page:Toulet - Mon Amie Nane, 1922.djvu/232

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de l’Exposition, parmi les vues de Venise et de Bruges-la-Morte. Faut-il que ces deux cités aient offensé le Ciel, pour être ainsi livrées aux peintres. Silencieux marais de Bruges, où se mirent, avec de pâles arbres, mainte façade bien retapée ; et vous, canaux vénitiens, où trempent des mirlitons, à l’ombre des palais roses : double royaume du moustique, quand donc une compagnie de tramways vous comblera-t-elle — et nos vœux ?

Mais quelques jours après, c’était sur le dos glauque de la Seine que nous voguions, Nane et moi, en un de ces bateaux aux flancs clairs qui volent vers l’Hôtel de Ville. L’après-midi était bien parisien ; l’air, aussi acide que si on y eût exprimé l’âme de mille citrons verts. On ne s’en pouvait garantir qu’en se tenant tout près de la machine — et alors, on se grillait d’un côté, comme Montezuma, — ou en descendant dans les « salons » — et alors ça sentait mauvais, et l’on n’apercevait plus goutte du panorama dont j’avais vanté l’agrément à mon amie.

Le charme de ces petites parties, c’est que « c’est fait avec rien ». Le beau travail, que d’amuser une dame au prix de sommes énormes.