Aller au contenu

Page:Tourgueneff - Récits d un chasseur, Traduction Halperine-Kaminsky, Ollendorf, 1893.djvu/252

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

es un serviteur dévoué. Que rend le battage ?

Sofron soupira.

— Eh bien, nos pères, le battage n’est pas tout à fait satisfaisant. Mais quoi, Arkadi Pavlitch, que je vous rapporte une petite affaire toute récente.

Il s’approcha de M. Penotchkine, se pencha en arrondissant les bras, en clignant d’un œil et dit :

— Un cadavre a été trouvé sur nos terres.

— Comment cela ?

— Nos pères !… mais je ne puis le comprendre moi-même ! Il faut, batiouchka, que cela vienne du Malin. Nous avons encore de la chance que ce soit à la lisière, près d’un champ qui appartient à d’autres. Mais, entre nous, c’était bien sur notre terre. J’ai lestement fait transporter le cadavre dans le champ du voisin pendant qu’on le pouvait encore. J’ai posé une sentinelle et j’ai recommandé le silence. Puis je me suis rendu chez le stanovoï, je l’ai informé à ma manière, puis je lui ai fait boire du thé… Qu’en pensez-vous, batiouchka ! Et je lui ai laissé un petit gage de reconnaissance. De la sorte la chose est restée sur le dos du voisin. Et un cadavre, vous le savez, cela vaut deux cents roubles de formalités ; c’est un compte réglé.