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Page:Tourgueneff - Récits d un chasseur, Traduction Halperine-Kaminsky, Ollendorf, 1893.djvu/302

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d’une voix haletante, tu ne m’échapperas pas !

Une lutte s’engagea. Je me précipitai dans la direction du bruit, me heurtant à chaque pas et j’arrivai sur le lieu de la lutte. Le Biriouk avait renversé un moujik contre l’arbre abattu, il le tenait sous lui et le garrottait de sa ceinture, les bras croisés au dos. Je m’approchai. Le Biriouk se releva et remit sur pied le voleur. C’était un moujik tout mouillé, haillonneux, la barbe sale et désordonnée. Un pauvre cheval maigre, à demi-couvert d’un lambeau de natte, se tenait là tout près d’un train de roues. Le forestier ne parlait pas, ni le moujik, mais celui-ci branlait la tête en soupirant.

— Lâche-le, dis-je tout bas au forestier, je te paierai le prix de l’arbre.

Le Biriouk prit silencieusement de la main gauche la bride du cheval, tandis qu’il retenait de la droite le voleur par la ceinture.

— Allons, marche corbeau, fit rudement le forestier.

— Prenez donc au moins la petite cognée, marmotta le moujik.

— En effet, pourquoi perdre cette cognée ?

Et le Biriouk ramassa la cognée.

Nous partîmes, je fermais la marche. La pluie recommençait à tomber, ce fut bientôt une nou-