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Page:Tourgueneff - Récits d un chasseur, Traduction Halperine-Kaminsky, Ollendorf, 1893.djvu/52

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la petite porte s’ouvrit ; le meunier apparut. C’était un homme de haute stature, visage gras, huileux, cou de taureau et panse rebondie. Il accepta ma proposition. À cent pas du moulin se trouvait un petit hangar ouvert aux quatre vents. On nous monta là de la paille et du foin ; le garçon meunier dressa sur l’herbe de la rive un samovar, et, assis sur les talons, se mit à souffler vigoureusement dans la cheminée du réchaud… Les charbons en prenant feu éclairaient son visage juvénile. Le meunier courut éveiller sa femme ; puis il revint, à la fin, me proposer lui-même d’aller coucher dans son izba ; mais je préférai rester au grand air. La meunière nous apporta du lait, des œufs, des pommes de terre et du pain ; bientôt l’eau du samovar fut en pleine ébullition, et nous prîmes le thé. De la rivière s’élevaient d’épaisses vapeurs ; il n’y avait pas de vent ; par intervalles, des râles de genêts poussaient, en se secouant, leur cri particulier. Les roues du moulin bruissaient faiblement : des gouttes tombaient et se faisaient jour par les fentes de la digue. Nous fîmes du feu entre des pierres. Pendant qu’Ermolaï grillait des pommes de terre dans la cendre, j’eus le temps de faire un somme. Un léger chuchotement me réveilla… Je relevai un peu la tête ; devant le