Page:Tourgueniev - Fumée.djvu/36

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— Qu’est-ce que cela te fait ?

— Qu’est-ce que cela me fait ! mais, attends, tu ne sais peut-être pas qui est également ici ? Goubaref ! Lui-même ! en personne ! Il nous est arrivé hier de Heidelberg. Tu le connais sûrement ?

— J’ai entendu parler de lui.

— Seulement ! Nous allons te traîner chez lui à l’instant. Ne pas connaître un tel homme ! Voilà précisément Vorochilof. Tu ne le connais peut-être pas non plus ? J’ai l’honneur de vous présenter l’un à l’autre. Vous êtes tous deux des savants ! Celui-ci est même un phénix ! Embrassez-vous !

En disant ces mots, Bambaéf se tourna vers un beau jeune homme à visage frais et rose, mais déjà sérieux. Litvinof se leva et, bien entendu, se dispensa d’embrasser « le phénix » qui, à juger par la gravité de son air, paraissait médiocrement flatté de cette présentation imprévue.

— J’ai dit un « phénix » et je ne démords pas de cette expression, continua Bambaéf. Passez au collège de Saint-Pétersbourg, regardez le tableau d’honneur, quel nom s’y voit en première ligne ? Celui de Simon Iakovlevitch Vorochilof ! Mais Goubaref, Goubaref !… voici, mes amis, chez qui il faut maintenant courir ! Je révère réellement cet homme, et je ne suis pas le seul… Tous, tous le révèrent à qui mieux mieux. Quel ouvrage il écrit maintenant !

— Sur quoi, cet ouvrage ? demanda Litvinof.

— Sur tout, mon ami. C’est un ouvrage dans le