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Page:Tourgueniev - Pères et fils.djvu/21

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pire ici est pur ! comme il est parfumé ! Je crois vraiment que cette délicieuse odeur est particulière à notre pays ! Et comme le ciel…

Arcade s’arrêta tout court, jeta timidement un regard derrière la voiture et se tut.

— Sans doute, répondit Kirsanof ; tu es né ici, et par conséquent tout doit y avoir à tes yeux…

— Peu importe, suivant moi, l’endroit où l’on est né, interrompit Arcade.

— Cependant…

— Non ; cela n’y fait absolument rien.

Kirsanof regarda son fils à la dérobée, et les deux interlocuteurs firent près d’une demi-verste sans ouvrir la bouche.

— Je ne sais si je t’ai appris, reprit enfin Kirsanof, que ta vieille bonne Yégorovna était morte.

— Vraiment ! pauvre femme ! Et Prokofitch, est-il toujours de ce monde ?

— Oui, et il est toujours le même ; toujours grognon comme autrefois. Tu ne trouveras pas de grands changements à Marino, je t’en préviens.

— As-tu encore le même intendant ?

— C’est peut-être le seul changement que j’aie fait. Je l’ai renvoyé, m’étant décidé à ne plus avoir à mon service des dvorovi[1] libres, ou du moins de ne leur confier aucune fonction qui entraîne une responsabilité quelconque.

  1. Serfs employés au service intérieur.