Page:Trollope - La Pupille.djvu/261

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et avait demandé qu’Algernon vînt lui tenir compagnie dans sa chambre. La vérité était que M. Thorpe craignait que M. Brandenberry, qu’il avait beaucoup connu autrefois, ne se rappelât sa voix ou sa figure, et ne dévoilât imprudemment son secret.

Mais les huit jours étaient passés et, à la demande de M. Jenkins, miss Martin Thorpe avait engagé ses cousines à rester encore une semaine : ce second délai allait finir aussi, et les Wilkins faisaient déjà leurs préparatifs de départ.

M. Thorpe comprit qu’il était temps de se faire connaître ; il choisit pour cela le moment où l’on rentra au salon après le dîner.

Le premier objet qui frappa la vue de Sophie, en ouvrant la porte du salon, fut le portrait dont elle avait copié si exactement le costume six ou sept mois auparavant. Le tableau était placé contre une fenêtre et admirablement bien éclairé. Toute autre aurait gardé de la reconnaissance à ce portrait qui avait été la cause de sa fortune ; mais Sophie le haïssait et avait ordonné qu’on l’ensevelît dans le grenier, sous prétexte qu’il était laid et que le cadre était trop vieux.

Mistress Barnes, qui aurait cru manquer de respect au fils de son ancien maître en agissant ainsi, l’avait au contraire accroché à la plus belle place dans la chambre qu’elle destinait au major et à mistress Heathcote.

Un jour, en-causant, M. Jenkins avait demandé à mistress Heathcote :

« N’avez-vous jamais vu un portrait du fils de M. Thorpe ? j’aurais grand plaisir à le regarder s’il n’a pas été détruit.

— Comment était ce portrait ? » demanda Algernon ; et, sans attendre de réponse, il dépeignit le costume et les principaux détails qu’il avait fait remarquer six mois auparavant à sir Charles. Sur la réponse affirmative de