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Page:Troude ha Milin - Ar marvailler brezounek.djvu/219

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LE CONTEUR BRETON

Allez en haut, la table est servie ; buvez et mangez, ne vous gênez pas.

Ces deux-ci, fatigués à mourir, ayant faim et soif, montèrent aussitôt, et mangèrent et burent ce qui leur faisait plaisir ; cela se comprend.

Après le repas, le père resta deux ou trois heures avec sa fille, sans que la bête approchât. Toutefois, vers quatre heures après-midi, on l’entendit venir, et elle dit au père : — Mange et bois encore avant de partir, car tu n’as plus longtemps à rester ici avec ta fille. — La table était servie, et la bête voyant que père et fille n’osaient manger ni boire en sa présence, se mit à dire : — Croyez-vous que tout cela ait été mis sur la table dans le but de vous faire mal ? Ne craignez rien. Quant à toi, père de cette jolie fille, il est temps de partir d’ici et de dire à ta fille : — Jusques aux joies du paradis, car tu ne la reverras plus. Donc, il t’est défendu de remettre les pieds ici ; tu n’en sortirais pas en vie.

Alors le père fit, en pleurant, ses adieux à sa fille, et celle-ci, pour lui réconforter le cœur, lui dit : — Il faut, mon père, obéir à la bête ; allez-vous-en donc, dans la crainte que vous n’en ayez repentir. Je serai heureuse ici, il ne faut pas pleurer sur mon sort.

Voilà pour lors le père qui part, les larmes aux