Aller au contenu

Page:Turgot - Œuvres de Turgot, éd. Eugène Daire, I.djvu/380

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

aux consommateurs, sans aucun préjudice, une augmentation dans le prix des grains, qui serait pour le cultivateur et le propriétaire la source d’un profit immense.

Or, il ne dépend que de vous, monsieur, de faire ce bien au consommateur. Les moyens en sont faciles : ils se réduisent : 1o à la suppression de tous les droits de minage et de péage existant encore sur les grains ; 2o à la suppression de la maîtrise des boulangers, qui, en ouvrant la porte à la concurrence, mettrait ce genre d’industrie au rabais ; 3o à l’encouragement de la bonne mouture et du commerce des farines, seul moyen de bannir entièrement les abus et les fraudes pratiquées par les meuniers. La suppression de la banalité des moulins consommerait cette révolution, surtout si elle était accompagnée d’instructions répandues dans le public sur les moyens de perfectionner la mouture et la boulangerie.

Les trois choses seraient très-faciles. J’ai déjà eu l’honneur de vous proposer, au mois de février dernier, un moyen simple de supprimer tous les droits de minage et de péage, en les faisant rembourser par les villes et les provinces, en un certain nombre d’années, par autant de payements qui comprendraient le capital et les intérêts jusqu’au parfait remboursement[1].

La suppression de la maîtrise des boulangers serait encore plus facile ; il n’en coûterait presque que de le vouloir. Dans la plus grande partie des villes, ces maîtrises existent sans autorisation légale. Leurs dettes seraient un obstacle bien léger ; à l’exception de Paris et de quelques villes du premier ordre, elles se réduisent à très-peu de chose, et l’on pourrait les faire rembourser par les villes.

La banalité des moulins pourrait être pareillement éteinte et remboursée par une imposition sur les villages assujettis à cette banalité. L’objet serait considérable s’il fallait rembourser la totalité de la valeur des moulins banaux, mais c’est ce dont il ne saurait être question. Le moulin, en perdant la banalité, conserverait la plus grande partie de sa valeur. Tant de moulins qui ne sont pas banaux, et qui se louent fort bien, prouvent suffisamment, que sans cette servitude, des moulins sont un bien très-avantageux à leur propriétaire ; et dans la réalité, le nombre actuel des moulins tire sa

  1. Nous n’avons pas la lettre qui contenait cette proposition.