Aller au contenu

Page:Turgot - Œuvres de Turgot, éd. Eugène Daire, I.djvu/553

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

réfléchir sur l’influence des capitaux dans toutes les entreprises lucratives de culture, d’industrie, de commerce, et sur l’indispensable nécessité des avances pour toutes ces entreprises.

Qu’est-ce que ces avances, et d’où peuvent-elles provenir, sinon des épargnes du revenu ? Il n’existe de richesses que les produits de la terre ; les avances ne peuvent donc s’accroître que par la réserve d’une partie de ce que produit la terre, et d’une partie de ce qui n’est point affecté indispensablement à la reproduction. Il n’importe que cette portion soit mise en réserve par les entrepreneurs des classes laborieuses ou par les propriétaires. Les entrepreneurs, dans le premier cas, réservent sur leurs profits et se forment des capitaux qu’ils emploient à augmenter leurs entreprises ; mais il faut pour cela que leurs profits soient un peu plus considérables que ce qui est indispensablement affecté à la reproduction de l’année suivante, ce qui arrive de deux façons : 1o parce que, outre la rentrée actuelle et le remplacement de leurs avances, outre le salaire de leur travail et leur subsistance, ils ont encore droit à un intérêt de leurs avances égal à ce que leur produirait le même capital employé de toute autre manière et sans travail de leur part, soit en acquisition de biens-fonds, soit en prêt à rente ; de sorte qu’il suffit qu’ils aient commencé avec un capital quelconque, pour que les intérêts de ce capital s’accumulant avec lui, le grossissent dans une progression assez rapide, car leur droit à la subsistance pour leur travail est indépendant de celui qu’ils ont de jouir des intérêts de leur capital ; 2o parce que le défaut de concurrence pour les entreprises met les entrepreneurs dans le cas de faire des profits plus considérables que ne l’exige la continuation de ces entreprises, et sur lesquels ils peuvent épargner beaucoup chaque année. Ces profits sont une portion du produit net que l’entrepreneur s’approprie au delà des reprises qui lui sont indispensablement dues, et aux dépens de la part du propriétaire. L’effet immédiat de l’épargne est l’accumulation des capitaux mobiliers ; et ces capitaux ne s’accumulent que dans la vue de se procurer un revenu ou profit annuel, ce qui ne se peut qu’en employant ce capital. — L’effet de cette accumulation est de diminuer l’intérêt de l’argent prêté ; d’augmenter la valeur vénale des biens-fonds ; de diminuer les reprises nécessaires des entrepreneurs en tout genre et les frais de toutes les entreprises ; de rendre profitables, et par conséquent possibles, des entre-