Page:Turgot - Œuvres de Turgot, éd. Eugène Daire, I.djvu/563

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peut payer l’impôt ; il faut encore qu’elle soit disponible, c’est-à-dire qu’elle ne soit pas nécessaire à la reproduction de l’année suivante, soit immédiatement, soit médiatement. Toute richesse peut être prise par une force supérieure ; mais nulle richesse nécessaire aux travaux de la reproduction n’en peut être détournée sans nuire à cette reproduction, à la richesse nationale, et par suite aux moyens de puissance du gouvernement. Voilà toute la théorie de l’impôt.

Les trois premières conséquences de cette doctrine des écrivains économiques se réduisent à la liberté indéfinie du commerce. L’utilité de cette liberté réclamée par les principes que l’auteur combat, est d’ailleurs établie sur tant d’autres principes incontestables, que la certitude n’en dépend nullement du système qu’on embrasse sur la nature des richesses et du revenu. Il ne faut pas croire qu’en permettant de vendre et d’acheter ce qu’on voudrait et à qui on voudrait, on abandonnât pour cela toute industrie, comme l’auteur et les autres partisans des prohibitions l’imaginent ou le disent : le raisonnement de ceux qui, pour faire peur de la liberté, supposent que les étrangers achèteront toutes nos matières premières, s’empareront de toute notre industrie, et feront tout notre commerce, est du même genre que celui des gens qui ont peur que la liberté de vendre notre grain aux étrangers ne nous fasse mourir de faim, quoiqu’elle augmente nécessairement notre reproduction et nos magasins, qui n’iront jamais chercher leur débit au loin quand ils en trouveront un avantageux dans l’intérieur.


J’appelle biens (bona) tout objet de jouissance, de possession, de désir, de besoin. J’appelle valeurs (merœ) toute chose susceptible d’échange et d’évaluation. J’appelle richesses (opes), tout bien commerçable, tout objet de jouissance qui a une valeur. Le revenu est la richesse que donne la terre au delà des frais et reprises de ceux qui la cultivent. L’eau est un bien qui n’a point de valeur. Le travail a une valeur, et n’est point par lui-même un bien. Des grains, des étoffes, sont des richesses. Ce qu’un fermier rend au propriétaire d’une terre, est un revenu.,

Il suit de ces définitions que la production du sol, quand elle n’est qu’égale aux frais, est richesse, mais richesse non disponible ; richesse, et non revenu. dans l’exemple cité du champ cultivé en lin, qui coûte cent francs au cultivateur, et qui ne lui rapporte que