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Page:Turgot - Œuvres de Turgot, éd. Eugène Daire, I.djvu/719

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forte que celle que supportent les provinces voisines et la plus grande partie des autres provinces du royaume.

Nous avons prouvé, dans une lettre très-détaillée, écrite en 1767, accompagnée d’un tableau des recouvrements, et jointe encore à notre Avis pour les impositions de 1769, que c’est à cette surcharge seule que l’on doit imputer le retard habituel qui dure depuis un temps immémorial dans la généralité de Limoges sur le recouvrement des impositions, retard tel, que les impositions ne sont soldées qu’à la fin de la troisième année, et que les contribuables ont toujours à satisfaire trois collecteurs à la fois. Nous avons observé alors que le seul moyen de rapprocher des termes ordinaires les recouvrements arriérés, était de mettre la province en état de s’acquitter par degrés, en diminuant la surcharge qui lui laisse à peine de quoi se soutenir au point où elle est sans augmenter la masse des arrérages.

Pour ramener les impositions de la généralité de Limoges à la même proportion que celles des autres provinces, c’est-à-dire pour qu’elle ne payât au roi que le tiers du revenu total, ou une somme égale à la moitié de ce que retirent les propriétaires, il faudrait une diminution effective de plus de 700,000 liv., dont la moitié fût portée sur la taille, et l’autre moitié sur les impositions accessoires. Ce n’est point à titre de grâce, ni dans la forme de moins-imposé que ce soulagement devrait lui être accordé ; c’est un changement permanent dans la proportion avec les autres provinces, un changement dans sa fixation sur les commissions mêmes des tailles et dans l’assiette du second brevet de la capitation, et non une faveur passagère qu’elle réclame de la bonté et de la justice du roi.

En quelque temps que ce fût, nous nous ferions un devoir d’insister avec force sur les preuves de cette surcharge, et sur la nécessité d’y avoir égard ; nous nous attacherions à lever les doutes et les difficultés qui ont pu jusqu’ici suspendre la décision du Conseil ; mais ce motif, tout puissant qu’il est, n’est que d’une faible considération en comparaison de ceux qui parlent dans ce moment en faveur de cette malheureuse province ; motifs dont la force impérieuse ne peut manquer de déterminer la justice, la bonté, nous osons dire la sagesse même du roi, à prodiguer à une partie de ses sujets dénués de toute autre ressource les soulagements et les secours les plus abondants.